Depuis l’apparition du terme, il y a près de 40 ans, la fœtopathie alcoolique a fini par être reconnue comme un problème de santé publique. Alicestine October s'est rendue au Cap occidental, province d’Afrique du Sud qui enregistre le taux le plus élevé au monde de fœtopathie alcoolique.
«Lorsque j’attendais mon fils, je buvais beaucoup, surtout en fin de semaine», dit Marion Williams, une mère de 45 ans qui a perdu deux de ses cinq enfants à la naissance.
Mme Williams vit dans l’une des régions viticoles renommées d’Afrique du Sud – le Cap occidental. Elle a commencé à boire à l’adolescence et pense avoir été retirée de l’école et mise au travail pour acheter du vin à ses parents.
Son troisième enfant est né attardé, déclare-t-elle. Elle se fait des reproches et impute à son alcoolisme les séquelles avec lesquelles il devra vivre jusqu’à la fin de ses jours.
«Il veut faire beaucoup de choses, mais je dois lui rappeler qu’il n’est pas comme les autres enfants: il peut faire un travail manuel et construire des placards, mais ne peut prétendre à un travail intellectuel», dit-elle à regret. «Il me demande pourquoi je buvais autant [pendant que je l’attendais]. Je n’ai pas vraiment de réponse à lui fournir.»
Une consommation abusive d’alcool pendant la grossesse peut entraîner une fausse couche ou se traduire par toute une série d’incapacités désignées comme l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale, dont la fœtopathie alcoolique est la manifestation la plus grave.
Les enfants qui en sont atteints naissent avec des déficiences physiques et mentales caractéristiques – petite taille, petite tête et petit cerveau.
Il n’y a pas de guérison possible. Le traitement repose sur les services médicaux et les services spécialisés en santé mentale qui prennent en charge les incapacités permanentes qui en résultent, lesquelles englobent les difficultés d’apprentissage, les problèmes de comportement, d’élocution, un retard dans les facultés motrices ou les aptitudes sociales, des troubles de mémoire et de l’attention.
«On estime que, dans ce pays, un million de personnes au moins présentent une fœtopathie alcoolique et près de 5 millions un syndrome partiel et [d’autres] troubles dus aux effets de l’alcool sur le fœtus. «Cette situation est tragique car on peut parfaitement l’éviter», déclare Denis Viljoen, chercheur spécialisé en génétique humaine au Cap, la capitale de la province du Cap occidental (Afrique du Sud).
«L’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale constitue la malformation congénitale la plus courante en Afrique du Sud, bien plus courante que la trisomie 21 et les malformations du tube neural combinées», dit M. Viljoen, qui a contribué à mettre sur pied en 1997 une organisation non gouvernementale (ONG) dénommée Foundation for Alcohol Related Research, après être parvenu à la terrible conclusion qu’au centre de consultation génétique d’un hôpital du Cap où il avait travaillé, un enfant sur dix était touché.
«J’ai alors constaté que la fœtopathie alcoolique était beaucoup plus courante que les gens ne pensent … [En Afrique du Sud] l’opinion a commencé à en prendre conscience grâce à notre recherche initiale», dit-il.
L’ONG lutte contre la fœtopathie alcoolique sur plusieurs fronts: elle recueille des données scientifiques pour mettre en évidence le problème dans l’espoir que les décideurs gouvernementaux financeront et mettront en place des programmes de prévention; elle forme le personnel des services médico-sociaux à élaborer des programmes de prévention et elle sensibilise le public à ce problème.
Fort de ses publications et ses recherches en cours, M. Viljoen estime que 70 à 80 nouveau-nés pour 1000 présentent ce syndrome au Cap occidental – soit l’incidence connue comme la plus élevée au monde. Le problème ne se limite d’ailleurs pas à la population rurale démunie de cette région. «Nous voyons de plus en plus d’enfants issus de la classe moyenne ou de milieux aisés venir consulter en privé pour des troubles causés par l’alcoolisation fœtale», dit-il.
«Dans les pays développés, la flambée récente des nouveaux cas est attribuée à une meilleure prise de conscience, au fait que davantage de médecins diagnostiquent le problème, non à une aggravation du problème. Tel est aussi le cas de l’Afrique du Sud», estime M. Viljoen.
Nous ne disposons pas de chiffres fiables sur la prévalence mondiale, mais une étude réalisée en 2005 estimait l’incidence mondiale à 0,97 pour 1000 naissances vivantes, d’après une étude effectuée aux États-Unis d’Amérique.
Les gouvernements de certains pays appliquent des programmes de prévention ciblés mais, le plus souvent, se défaussent sur les ONG.
Dans la communauté d’exploitants agricoles où vit Mme Williams, la consommation abusive d’alcool découle d’une pratique datant de 400 ans qui consistait à récompenser les esclaves et leurs descendants en leur donnant de l’alcool et à les maintenir captifs par la dépendance.
«Vu le manque de moyens financiers pour atteindre les zones urbaines, notre action est largement confinée aux communautés rurales», déclare François Grobbelaar, qui dirige FASfacts, une ONG collaborant avec les communautés agricoles pour prévenir la fœtopathie alcoolique.
Si la rémunération en nature sous forme de vin, qui a été interdite dans les années 1960, a consolidé une culture valorisant l’abus d’alcool et contribue encore à une consommation excessive chez les mères de famille du Cap occidental, les études montrent qu’une nutrition carencée, une mauvaise santé, le stress et le tabagisme ont aussi une incidence sur la gravité des effets de l’alcool sur le fœtus. Les communautés les plus touchées sont souvent les milieux pauvres, peu instruits et socialement défavorisés, comme les populations autochtones du Cap occidental, qui descendent en partie des Khoisans, les Aborigènes d’Australie et les Amérindiens des États-Unis d’Amérique.
La prise de conscience du problème s’est accrue depuis 1973, date à laquelle est apparu le terme de fœtopathie alcoolique.
Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, l’ONG NoFAS a été créée en 2003 par la mère adoptive d’un enfant présentant le syndrome et, en 2007, l’Association médicale britannique a publié un rapport appelant les professionnels de santé à redoubler d’efforts pour prévenir ce problème.
Dans la Fédération de Russie, des chercheurs attachés à l’Université d’Etat de Saint-Pétersbourg et à l’Institut pédagogique d’État de Nijni Novgorod travaillent depuis 2003 à un projet tendant à inciter les femmes à ne pas consommer d’alcool pendant leur grossesse. Pour ce faire, ils collaborent avec le Heatlh Sciences Center [Centre des Sciences de la Santé] de l’Université d’Oklahoma et sont financés par les instituts nationaux de santé et les Centres de Lutte contre la Maladie des Etats-Unis d’Amérique.
Ce projet comprend la collecte des données nécessaires à la création d’une base de connaissances permettant d’élaborer des stratégies de prévention, la mise au point de matériels éducatifs à l’intention du public et des médecins, et un essai randomisé portant sur 20 sites afin de tester une intervention de prévention pour les femmes en situation de risque. D’après le chercheur principal, Mme Tatiana Balachova, l’essai clinique sera achevé l’an prochain.
«On doit enseigner aux médecins et au personnel infirmier comment parler aux femmes de manière convaincante», déclare Elena Varavikova, expert éminent auprès de l’Institut de Recherche fédéral sur les Soins de Santé à Moscou. «Cet aspect devrait faire partie de la formation médicale continue.» Les médecins et autres professionnels de santé ont aussi besoin d’incitations pour effectuer un travail de prévention.
Le financement de ces activités devrait être pris en charge par les assurances-maladie, dit-elle.
«Notre pays enregistre l’un des taux de consommation d’alcool les plus élevés – phénomène en hausse dans la population féminine – et les études récentes ont révélé des taux élevés de fœtopathie alcoolique dans les orphelinats de Russie. L’heure est à l’action», dit Mme Varavikova, qui collabore au projet.
Dans la province du Cap occidental (Afrique du Sud), ce syndrome s’inscrit dans le cadre du problème plus vaste de l’abus d’alcool, lequel entraîne dans son sillage une multitude d’incapacités dues aux traumatismes, découlant souvent de violences interpersonnelles, et aux maladies.
«C’est ce que nous pouvons constater tous les vendredis et samedis soirs dans les services de traumatologie de notre hôpital», déclare Robert Macdonald, chef du l’unité de toxicomanie auprès de la collectivité territoriale du Cap occidental. Il espère que la loi provinciale sur les boissons alcoolisées, qui entre en vigueur cette année, réduira l’offre d’alcool en en limitant l’accès, notamment par la fermeture des shebeens (bars) clandestins, et en interdisant la vente d’alcool à crédit. Il craint néanmoins que les forces de police aient du mal à remplir cette tâche. «La province compte 37 000 shebeens (clandestins et ne dispose que de quelques centaines d’officiers de police pour faire appliquer la loi.»
Comme le constate M. Macdonald, cette pathologie coûte cher à la société. «La fœtopathie alcoolique fait aussi débat car les enfants qui en souffrent ont besoin d’une scolarité adaptée et d’autres formes de soins spécialisés. Il s’agit véritablement d’une réaction en chaîne.» Il ajoute que le Ministère de la Santé de la province du Cap occidental lance cette année une série télévisée intitulée «Booza TV» en vue de sensibiliser la population à l’abus d’alcool.
Une étude publiée en 2004 dans l’American Medical Journal estimait qu’aux États-Unis d’Amérique, les coûts sociaux – perte de productivité, coût des soins médicaux à vie et de réinsertion – s’établissaient à 4 milliards de dollars environ en 1998.
La fœtopathie alcoolique n’est pas toujours diagnostiquée quand il s’agit d’enfants adoptés ou placés dans une famille d’accueil et que leurs nouveaux parents ne connaissent pas les antécédents alcooliques de la mère, disent les organisateurs des campagnes de lutte contre ce fléau. Dans le cas de troubles causés par l’alcoolisation fœtale autres que la fœtopathie alcoolique notamment, les enfants peuvent parfaitement ressembler aux autres mais leurs problèmes de comportement risquent d’être mal interprétés s’ils n’ont pas été diagnostiqués correctement.
L’ONG FASfacts organise des campagnes de prévention contre la fœtopathie alcoolique à l’intention des écoliers et collégiens, d’autres groupes de jeunes et des adultes. En outre, elle collabore avec les propriétaires de débits de boisson en les formant à ne pas vendre de l’alcool à des femmes enceintes et à des mineurs. Dans un projet, l’ONG met à disposition d’une centaine de femmes enceintes vivant dans des communautés à haut risque les services d’un tuteur qui les soutient et les encourage à ne pas boire d’alcool.
M. Viljoen dit que la Foundation for Alcohol Related Research est «très peu subventionnée» par le Ministère du Développement social et de l’Agriculture pour ses travaux de formation, de prévention, de recherche et de sensibilisation et qu’elle ne reçoit aucune aide de la part du Ministère de la Santé de la province du Cap occidental.
Or, malgré tous ces efforts, tant que l’alcool sera accessible, abordable et socialement acceptable, la prévention sera une tâche ardue.
Vu la dépendance créée par l’alcool, certaines femmes continuent de boire de façon excessive pendant leur grossesse, tout en bénéficiant de conseils les incitant à ne pas le faire. Il a été recommandé à Mme Williams d’arrêter de boire alors qu’elle attendait son fils: «j’étais tenace et j’ai tout simplement continué à boire».
C’est seulement lorsque Mme Williams attendait sa cadette qu’elle a réussi à s’arrêter pour de bon. Le résultat a été concluant et, aujourd’hui, sa fille a 12 ans et souhaite devenir enseignante.
Rédigé avec la contribution d'Elena Zolotova à Moscou.
«Lorsque j’attendais mon fils, je buvais beaucoup, surtout en fin de semaine», dit Marion Williams, une mère de 45 ans qui a perdu deux de ses cinq enfants à la naissance.
Mme Williams vit dans l’une des régions viticoles renommées d’Afrique du Sud – le Cap occidental. Elle a commencé à boire à l’adolescence et pense avoir été retirée de l’école et mise au travail pour acheter du vin à ses parents.
Son troisième enfant est né attardé, déclare-t-elle. Elle se fait des reproches et impute à son alcoolisme les séquelles avec lesquelles il devra vivre jusqu’à la fin de ses jours.
«Il veut faire beaucoup de choses, mais je dois lui rappeler qu’il n’est pas comme les autres enfants: il peut faire un travail manuel et construire des placards, mais ne peut prétendre à un travail intellectuel», dit-elle à regret. «Il me demande pourquoi je buvais autant [pendant que je l’attendais]. Je n’ai pas vraiment de réponse à lui fournir.»
Une consommation abusive d’alcool pendant la grossesse peut entraîner une fausse couche ou se traduire par toute une série d’incapacités désignées comme l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale, dont la fœtopathie alcoolique est la manifestation la plus grave.
Les enfants qui en sont atteints naissent avec des déficiences physiques et mentales caractéristiques – petite taille, petite tête et petit cerveau.
Il n’y a pas de guérison possible. Le traitement repose sur les services médicaux et les services spécialisés en santé mentale qui prennent en charge les incapacités permanentes qui en résultent, lesquelles englobent les difficultés d’apprentissage, les problèmes de comportement, d’élocution, un retard dans les facultés motrices ou les aptitudes sociales, des troubles de mémoire et de l’attention.
«On estime que, dans ce pays, un million de personnes au moins présentent une fœtopathie alcoolique et près de 5 millions un syndrome partiel et [d’autres] troubles dus aux effets de l’alcool sur le fœtus. «Cette situation est tragique car on peut parfaitement l’éviter», déclare Denis Viljoen, chercheur spécialisé en génétique humaine au Cap, la capitale de la province du Cap occidental (Afrique du Sud).
«L’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale constitue la malformation congénitale la plus courante en Afrique du Sud, bien plus courante que la trisomie 21 et les malformations du tube neural combinées», dit M. Viljoen, qui a contribué à mettre sur pied en 1997 une organisation non gouvernementale (ONG) dénommée Foundation for Alcohol Related Research, après être parvenu à la terrible conclusion qu’au centre de consultation génétique d’un hôpital du Cap où il avait travaillé, un enfant sur dix était touché.
«J’ai alors constaté que la fœtopathie alcoolique était beaucoup plus courante que les gens ne pensent … [En Afrique du Sud] l’opinion a commencé à en prendre conscience grâce à notre recherche initiale», dit-il.
L’ONG lutte contre la fœtopathie alcoolique sur plusieurs fronts: elle recueille des données scientifiques pour mettre en évidence le problème dans l’espoir que les décideurs gouvernementaux financeront et mettront en place des programmes de prévention; elle forme le personnel des services médico-sociaux à élaborer des programmes de prévention et elle sensibilise le public à ce problème.
Fort de ses publications et ses recherches en cours, M. Viljoen estime que 70 à 80 nouveau-nés pour 1000 présentent ce syndrome au Cap occidental – soit l’incidence connue comme la plus élevée au monde. Le problème ne se limite d’ailleurs pas à la population rurale démunie de cette région. «Nous voyons de plus en plus d’enfants issus de la classe moyenne ou de milieux aisés venir consulter en privé pour des troubles causés par l’alcoolisation fœtale», dit-il.
«Dans les pays développés, la flambée récente des nouveaux cas est attribuée à une meilleure prise de conscience, au fait que davantage de médecins diagnostiquent le problème, non à une aggravation du problème. Tel est aussi le cas de l’Afrique du Sud», estime M. Viljoen.
Nous ne disposons pas de chiffres fiables sur la prévalence mondiale, mais une étude réalisée en 2005 estimait l’incidence mondiale à 0,97 pour 1000 naissances vivantes, d’après une étude effectuée aux États-Unis d’Amérique.
Les gouvernements de certains pays appliquent des programmes de prévention ciblés mais, le plus souvent, se défaussent sur les ONG.
Dans la communauté d’exploitants agricoles où vit Mme Williams, la consommation abusive d’alcool découle d’une pratique datant de 400 ans qui consistait à récompenser les esclaves et leurs descendants en leur donnant de l’alcool et à les maintenir captifs par la dépendance.
«Vu le manque de moyens financiers pour atteindre les zones urbaines, notre action est largement confinée aux communautés rurales», déclare François Grobbelaar, qui dirige FASfacts, une ONG collaborant avec les communautés agricoles pour prévenir la fœtopathie alcoolique.
Si la rémunération en nature sous forme de vin, qui a été interdite dans les années 1960, a consolidé une culture valorisant l’abus d’alcool et contribue encore à une consommation excessive chez les mères de famille du Cap occidental, les études montrent qu’une nutrition carencée, une mauvaise santé, le stress et le tabagisme ont aussi une incidence sur la gravité des effets de l’alcool sur le fœtus. Les communautés les plus touchées sont souvent les milieux pauvres, peu instruits et socialement défavorisés, comme les populations autochtones du Cap occidental, qui descendent en partie des Khoisans, les Aborigènes d’Australie et les Amérindiens des États-Unis d’Amérique.
La prise de conscience du problème s’est accrue depuis 1973, date à laquelle est apparu le terme de fœtopathie alcoolique.
Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, l’ONG NoFAS a été créée en 2003 par la mère adoptive d’un enfant présentant le syndrome et, en 2007, l’Association médicale britannique a publié un rapport appelant les professionnels de santé à redoubler d’efforts pour prévenir ce problème.
Dans la Fédération de Russie, des chercheurs attachés à l’Université d’Etat de Saint-Pétersbourg et à l’Institut pédagogique d’État de Nijni Novgorod travaillent depuis 2003 à un projet tendant à inciter les femmes à ne pas consommer d’alcool pendant leur grossesse. Pour ce faire, ils collaborent avec le Heatlh Sciences Center [Centre des Sciences de la Santé] de l’Université d’Oklahoma et sont financés par les instituts nationaux de santé et les Centres de Lutte contre la Maladie des Etats-Unis d’Amérique.
Ce projet comprend la collecte des données nécessaires à la création d’une base de connaissances permettant d’élaborer des stratégies de prévention, la mise au point de matériels éducatifs à l’intention du public et des médecins, et un essai randomisé portant sur 20 sites afin de tester une intervention de prévention pour les femmes en situation de risque. D’après le chercheur principal, Mme Tatiana Balachova, l’essai clinique sera achevé l’an prochain.
«On doit enseigner aux médecins et au personnel infirmier comment parler aux femmes de manière convaincante», déclare Elena Varavikova, expert éminent auprès de l’Institut de Recherche fédéral sur les Soins de Santé à Moscou. «Cet aspect devrait faire partie de la formation médicale continue.» Les médecins et autres professionnels de santé ont aussi besoin d’incitations pour effectuer un travail de prévention.
Le financement de ces activités devrait être pris en charge par les assurances-maladie, dit-elle.
«Notre pays enregistre l’un des taux de consommation d’alcool les plus élevés – phénomène en hausse dans la population féminine – et les études récentes ont révélé des taux élevés de fœtopathie alcoolique dans les orphelinats de Russie. L’heure est à l’action», dit Mme Varavikova, qui collabore au projet.
Dans la province du Cap occidental (Afrique du Sud), ce syndrome s’inscrit dans le cadre du problème plus vaste de l’abus d’alcool, lequel entraîne dans son sillage une multitude d’incapacités dues aux traumatismes, découlant souvent de violences interpersonnelles, et aux maladies.
«C’est ce que nous pouvons constater tous les vendredis et samedis soirs dans les services de traumatologie de notre hôpital», déclare Robert Macdonald, chef du l’unité de toxicomanie auprès de la collectivité territoriale du Cap occidental. Il espère que la loi provinciale sur les boissons alcoolisées, qui entre en vigueur cette année, réduira l’offre d’alcool en en limitant l’accès, notamment par la fermeture des shebeens (bars) clandestins, et en interdisant la vente d’alcool à crédit. Il craint néanmoins que les forces de police aient du mal à remplir cette tâche. «La province compte 37 000 shebeens (clandestins et ne dispose que de quelques centaines d’officiers de police pour faire appliquer la loi.»
Comme le constate M. Macdonald, cette pathologie coûte cher à la société. «La fœtopathie alcoolique fait aussi débat car les enfants qui en souffrent ont besoin d’une scolarité adaptée et d’autres formes de soins spécialisés. Il s’agit véritablement d’une réaction en chaîne.» Il ajoute que le Ministère de la Santé de la province du Cap occidental lance cette année une série télévisée intitulée «Booza TV» en vue de sensibiliser la population à l’abus d’alcool.
Une étude publiée en 2004 dans l’American Medical Journal estimait qu’aux États-Unis d’Amérique, les coûts sociaux – perte de productivité, coût des soins médicaux à vie et de réinsertion – s’établissaient à 4 milliards de dollars environ en 1998.
La fœtopathie alcoolique n’est pas toujours diagnostiquée quand il s’agit d’enfants adoptés ou placés dans une famille d’accueil et que leurs nouveaux parents ne connaissent pas les antécédents alcooliques de la mère, disent les organisateurs des campagnes de lutte contre ce fléau. Dans le cas de troubles causés par l’alcoolisation fœtale autres que la fœtopathie alcoolique notamment, les enfants peuvent parfaitement ressembler aux autres mais leurs problèmes de comportement risquent d’être mal interprétés s’ils n’ont pas été diagnostiqués correctement.
L’ONG FASfacts organise des campagnes de prévention contre la fœtopathie alcoolique à l’intention des écoliers et collégiens, d’autres groupes de jeunes et des adultes. En outre, elle collabore avec les propriétaires de débits de boisson en les formant à ne pas vendre de l’alcool à des femmes enceintes et à des mineurs. Dans un projet, l’ONG met à disposition d’une centaine de femmes enceintes vivant dans des communautés à haut risque les services d’un tuteur qui les soutient et les encourage à ne pas boire d’alcool.
M. Viljoen dit que la Foundation for Alcohol Related Research est «très peu subventionnée» par le Ministère du Développement social et de l’Agriculture pour ses travaux de formation, de prévention, de recherche et de sensibilisation et qu’elle ne reçoit aucune aide de la part du Ministère de la Santé de la province du Cap occidental.
Or, malgré tous ces efforts, tant que l’alcool sera accessible, abordable et socialement acceptable, la prévention sera une tâche ardue.
Vu la dépendance créée par l’alcool, certaines femmes continuent de boire de façon excessive pendant leur grossesse, tout en bénéficiant de conseils les incitant à ne pas le faire. Il a été recommandé à Mme Williams d’arrêter de boire alors qu’elle attendait son fils: «j’étais tenace et j’ai tout simplement continué à boire».
C’est seulement lorsque Mme Williams attendait sa cadette qu’elle a réussi à s’arrêter pour de bon. Le résultat a été concluant et, aujourd’hui, sa fille a 12 ans et souhaite devenir enseignante.
Rédigé avec la contribution d'Elena Zolotova à Moscou.
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